Si c’était Icare

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    Sepideh Farsi, par Arnaud Hée

    Entre ici et là-bas, c’est une trajectoire que décrit Sepideh Farsi film après film. Et dernièrement, il s’est agi de faire sortir des images de là-bas pour les montrer ici, et ailleurs. Si elle partage quelque chose avec Icare, ce serait l’exil, et une existence en forme de dédale. À l’égard de sa condition, la cinéaste trouve ici, en accomplissant un trajet aérien, une place particulière dans le fait d’être entre un point et un autre. Dans cette béance, Sepideh Farsi est en quelque sorte chez elle.

    Contrairement à Icare, il ne s’agit pas de violer sa propre condition par péché d’orgueil. Il y a bien un léger souffle de vent qui parcourt le métrage, on aura aussi, comme un contrepoint, le murmure d’un terminal aéroportuaire anonyme. On ne vivra pas ici l’ascendance du décollage, seulement la plénitude fragile de l’horizontalité d’un vol. Puis une redescente parmi les siens, lorsque les choses deviennent à nouveau plus lisibles, quand les contingences du quotidien refont surface.

    Adopter le point de vue aérien est évidemment grisant. Des paysages à décrypter, un monde à déchiffrer ; on s’autorise ce regard de juge omniscient sur une œuvre humaine mêlant le vaniteux, le magnifique et le ridicule. Comme dans Andreï Roublev de Tarkovski, la caméra reste braquée sur un élément terrestre qui aimante, dont on ne s’extrait pas. Ce que l’on y voit est un peu de soi-même. Des roches brisées et des blocs fracturés capturés au téléobjectif, dont on ne perçoit pas l’échelle de grandeur : violentes et profondes ruptures dans l’espace. A-t-on affaire à des frontières ?  Ce sont, quoi qu’il en soit, des blessures, des plaies ouvertes.

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