L’Image dans la fenêtre

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    par Érik Bullot

    L’extrême cohérence des films de Jean-Claude Rousseau frappe d’emblée le spectateur. Une fenêtre. Un paysage. Le cinéaste dans sa chambre d’hôtel. L’autoportrait au miroir. La fuite en perspective d’une rue ou d’une avenue. Les intermittences de la lumière. C’est par l’élection d’un certain nombre de contraintes formelles – un répertoire fixe de motifs, l’inscription géographique, le passage du dedans au dehors, le principe musical de la variation – que le cinéaste institue le lieu, le milieu plus exactement, au sens physique, d’un événement possible, quoique secret, tenu en lisière, retenu, au seuil du visible. Ce rituel de la mise en cadre, d’une haute précision, méticuleux et fragile, finit par produire en nous, sourdement, au vu du retour régulier des motifs, un sentiment de suspense délectable. Nous guettons, une fois encore, la vue de la fenêtre, le paysage soufflé dans la lumière, la rumeur persistante du dehors, le regard du cinéaste surpris dans la pénombre, le poudroiement coloré de l’air, l’entrée dans le champ du cinéaste venu habiter le lieu de son cadre le temps du plan, comme autant d’événements prévisibles et inattendus. Cette tension fertile entre la sobriété du dispositif, sa ténuité, sa clôture et la richesse de la sensation produite m’avait déjà beaucoup frappé dans les deux longs métrages de Jean-Claude Rousseau, les Antiquités de Rome et la Vallée close. En exhibant le film en train de se faire sous nos yeux, en dénudant le procédé (les bobines super-8 sont mises bout à bout, sans montage, avec l’amorce blanche qui les sépare), le cinéaste inquiète la matière même du film, sa composition à venir, la distance entre l’enregistrement brut du plan et sa relation imprévue sinon hasardeuse avec les plans qui lui succéderont (on se souvient de la référence à la physique de Lucrèce dans La vallée close et de la conception du montage exprimée par Jean-Claude Rousseau comme mise en orbite d’atomes détachés qui viennent à former une constellation). Aussi le filmage, jouant des arcanes de son apparente simplicité, se révèle-t-il l’occasion inattendue d’une advenue, d’une surprise. Cet émoi suppose un transfert d’énergie, une foudre. Les films de Jean-Claude Rousseau déploient, pour alimenter ce courant, les différentes ressources de l’exposition : exposition de la lumière, poudroyante à travers les rideaux d’une chambre, se modifiant au gré des heures, brûlant les surfaces blanches, blessant d’un rectangle doré le fond sombre des intérieurs, voilant la pellicule de part en part comme un vitrail ; exposition des lieux, différemment éclairés selon leur orientation, cartographiés par le cinéaste ; exposition musicale du thème principal dont le film décline les variations ; exposition du ruban filmique dont sont rendues visibles les amorces et la continuité des prises mais aussi exposition du cinéaste (il entre dans le champ, s’assoit, prend place dans le cadre, regarde parfois la caméra, explore la durée de son propre plan et disparaît). Il convient de relever que le terme d’« exposition » renvoie également au pilori et au supplice. L’attente du cinéaste est douloureuse, solitaire ; elle conjugue l’âpreté de son principe et la sensualité de ses éblouissements.Mais cette tension à l’œuvre dans le cinéma de Jean-Claude Rousseau ne recoupe-t-elle pas l’écart entre la mise en scène telle que la politique des auteurs a pu la constituer comme objet théorique et le dispositif au sens donné plus couramment à ce terme par l’art contemporain ? Les films de Jean-Claude Rousseau se situent à la frontière de deux lignes asymptotiques. L’attente de la lumière, la patience du cadre, l’équilibre interne des éléments plastiques en vue de la composition d’ensemble, la retenue du jeu témoignent de postures de la part du cinéaste qui relèvent de la mise en scène en ce qu’elle tend à l’élucidation d’une position morale sur le monde. Mais dans la manière dont le film se fait et se défait sous nos yeux, dans cette impossibilité même du film, livré à la contiguïté des bobines, à la matité impersonnelle de son dispositif d’enregistrement, et surtout dans la présence mystérieuse du cinéaste qui s’expose et s’absente à la fois devant nous, s’accomplit en sourdine la disparition de l’auteur. Entre l’aléa de la mise en scène et l’ellipse du dispositif, le cinéaste s’est éclipsé sous nos yeux. Ce double mouvement institue un milieu d’attente paradoxal. Qui est l’hôte du film ? Il semble que celui-ci vise moins un destinataire précis qu’un tiers, retenu sur le seuil, dont le spectateur guette l’incertaine venue. Un hôte invisible, en lisière du film, se laisse souvent deviner. Il sera présent, discrètement, dans les films à venir, surgissant du cadre noir du forum de Trajan, de la bouche cornue du téléphone ou, peut-être, de la grotte obscure de La vallée close. C’est sans doute cette relation entre le cinéaste qui s’absente, le tiers improbable et le spectateur qui circonscrit le mieux le territoire du cinéma de Jean-Claude Rousseau.Ces trois films, Jeune femme à sa fenêtre lisant une lettre, Venise n’existe pas et Keep in Touch, réalisés entre 1983 et 1987, en révélant une sorte d’archéologie de l’œuvre, nous offrent l’occasion de retracer sa généalogie. Il est curieux de remarquer que le dispositif-retard, à l’œuvre dans chaque film – le retard du cinéaste qui met en marche sa caméra, la contourne et vient se placer devant l’objectif, en attente comme pour une photographie –, opère pour l’ensemble des films, rendus visibles des années après leur filmage, en un différé qui est aussi le thème secret de l’œuvre. Aussi ces trois films, et plus particulièrement le premier, Jeune femme à sa fenêtre lisant une lettre, sont-ils comme les antichambres des films à venir.À partir du tableau homonyme de Vermeer dont il redistribue et complète les motifs – le châssis d’un tableau, une carte au mur dont les plis sont visibles, une fenêtre, une lettre, un modèle –, ce film de chambre, comme on dit musique de chambre, développe en quatre mouvements une série de variations formelles. Cette composition, complexe et réflexive, où ce sont les éléments structurels du tableau et du film qui constituent le matériau même de l’œuvre, s’inscrit dans un courant du cinéma expérimental où nous pourrions croiser le célèbre Wavelenght de Michael Snow ou certains films de Kurt Kren. Le motif de la lettre, dont on connaît la place énigmatique dans l’œuvre de Vermeer, occupe le foyer spéculaire de cet ensemble de variations. « Cette lettre serait dans le film. On la verrait posée sur la table à côté de la visionneuse. Elle serait restée là après mon départ et le courant d’air par la fenêtre encore ouverte n’aurait pas fait qu’elle s’envole », nous dit à plusieurs reprises la voix off du film. Manuscrite, posée sur un escabeau, la lettre renvoie à son propre statut selon un principe de mise en abyme familier au cinéaste (il suffit à cet égard de lire son beau scénario, Le concert champêtre, pour mesurer sa réelle affection pour ce procédé). Le film exhibe sa composition ; il se construit sous nos yeux. C’est ainsi que les quatre piles de bobines super-8 posées sur une table en ouverture seront celles montées ensuite bout à bout pour venir former les quatre mouvements du film, nous offrant une image littérale de la structure d’ensemble. Nombre de caractéristiques propres à l’art du cinéaste sont déjà perceptibles dans ce premier film : la contiguïté des rushes qui conjugue l’aléa et le programme, le motif obsédant de la fenêtre, une attention extrême portée aux variations de la lumière et à sa possible exténuation par épuisement, l’appel du vide (évoqué ici par la récurrence du blanc : la carte de géographie en ouverture du film et sa localité LE BLANC, le papier à lettres, l’obstruction de la fenêtre par des feuilles de papier à dessin, la séparation des bobines par l’amorce blanche), les allées et venues du cinéaste, l’autoportrait au miroir, le thème de la lettre, la présence absente d’un tiers et l’affleurement d’un récit en lisière du film.

    Mais si ce film nous surprend, c’est moins par ses traits formels d’influence moderniste (sérialité, mise en abyme, dénudation du procédé, variations) qui en constituent le socle que par le point de fuite inédit qu’il propose en regard de la clôture de ce système. Dans les derniers plans du film, en toute fin, après avoir distribué les motifs épars du tableau, le cinéaste, une lettre à la main, entre dans le champ, s’approche de la fenêtre et vient se placer dans le cadre au lieu occupé par la jeune femme dans le tableau de Vermeer. À travers ses approximations successives, ses variations et ses mises en abyme, le film cherchait à retrouver la justesse d’un cadre. Plusieurs prises seront nécessaires pour retrouver l’évidence et la précision des lignes du tableau, mais le plan sera là. En occupant la place du modèle, le cinéaste ouvre la boîte perspective dans laquelle il avait enclos les éléments du film. La chambre noire est percée d’un sténopé. Désormais le cinéaste viendra se placer à la fenêtre et le battement entre le regard et la vue constituera le thème de ses films. La mise à plat des motifs du tableau, réfléchis par le jeu plastique de leurs variations, conduit à la révélation d’un point de fuite : le regard du cinéaste, à la croisée, point d’articulation inaugural entre le dispositif et la mise en scène. Cette fenêtre sera-t-elle enjambée ? Est-elle une butée ? Le dehors est-il une chute ? Jeune femme à sa fenêtre se clôt au seuil de l’œuvre qui peut désormais s’accomplir.

    Le second film, Venise n’existe pas, déchiffre la cité italienne d’une manière fort paradoxale. Nous retrouvons une même âpreté d’allure, la coupe franche des sons d’ambiance, le bout à bout des bobines de super-8, la fenêtre et les variations de lumière, les allées et venues du cinéaste du lit à la fenêtre, la présence absente d’un destinataire à travers la sonnerie d’un téléphone coupée d’un « non, non, non » dit d’une voix mate. Le film toutefois doit affronter deux topiques : le panorama (c’est sur le grand canal, dit-on, qu’Eugène Promio, l’opérateur de Louis Lumière, inventa le premier travelling en posant sa caméra sur une gondole) et le cliché (Venise est par excellence la ville des lieux communs, ce dont témoigne la tradition des vedute). Ces deux topiques sont à la fois présents et déjoués. Le démon du panorama est conjuré par la fixité de la caméra et le cadre de la fenêtre qui fragmente, au son d’une ritournelle, le passage lent et régulier des embarcations. Venise ne prend pas. Le regard doit construire son objet ; or le cliché abolit ce travail par la persistance d’une image mentale déjà construite. En se concluant sur une carte postale qui reste très longtemps floue – par où le motif de la lettre, conjugué avec la sonnerie du téléphone, renvoie au thème du destinataire –, Venise n’existe pas expose la difficile cristallisation de l’image. Du lit à la fenêtre, de la chambre au voyage, le cinéaste tente de s’approcher d’une image soustraite au regard, différée voire expédiée d’un lieu à l’autre. Le titre manuscrit à la fin du film, Venise n’existe pas, est-il le message au verso de la carte postale vue précédemment ? Et le film lui-même une carte postale forclose ?

    Keep in Touch explore le temps de l’attente. Le cinéaste est assis à une table dans une chambre à New York, une feuille blanche devant lui comme pour écrire une lettre. Il allume une lampe de bureau, feuillette un magazine érotique. Nous entendons divers messages sur un répondeur téléphonique : des chuchotements ponctués d’un « love, love, love » ; passant du français à l’anglais, une voix évoque la reprise d’un appartement : une autre, en anglais, surprise par le répondeur, sollicite sans trop y croire un prochain rendez-vous. Le film raconte cette vacance, le laps entre la rencontre et l’attente. La rumeur de la ville, insistante, est perceptible, trouée par la sirène d’une ambulance. Du cadre rigide de la fenêtre aux vues fixes d’avenues enneigées, du mouvement brownien des patineurs au lent passage des nuages au-dessus de la jetée, un tracé formel semble ordonner le flux des éléments, préfigurant la composition géométrique des Antiquités de Rome. Keep in Touch dessine un chemin solitaire, escarpé, circulaire. Trajet de solitude dans l’attente d’un contact laissé en suspens, irrésolu, ce film s’apparente à une station, au sens de pause et de prière. À la fin du film, le cinéaste est à nouveau devant sa feuille blanche. La lettre n’est toujours pas écrite. Et les trois mots manuscrits qui suivent, Keep in Touch, en guise de générique, semblent parapher, une nouvelle fois, une lettre restée blanche. Les films de Jean-Claude Rousseau sont à cet égard, littéralement, des envois ou des lettres filmées.

    Ces deux films, Venise n’existe pas et Keep in Touch, que je me contente ici d’évoquer, témoignent tous deux d’un équilibre fragile entre la rugosité du matériau – le grain de la pellicule, la brûlure de la lumière, la présence des amorces et jusqu’au ton désespéré et revêche de leur récit pudique – et la partition d’ensemble, la trame invisible qui les sous-tend, les lignes de force que l’on devine. Entre fragilité et rigueur, instabilité et équilibre, les films de Jean-Claude Rousseau sont à venir ; ils laissent subsister trous et lacunes par où le réel affleure, en filigrane. L’image n’est pas dans le tapis. Elle est, là, dans la fenêtre, défenestrée. Le cinéaste franchit le pas.

    The Image in the Window
    by Erik Bulllot

    The extreme coherence of the films of Jean-Claude Rousseau strikes the spectator right away. A window. A landscape. The filmmaker in his hotel room. The self-portrait in the mirror. Someone fleeing the street in perspective. Intermittently flashing light. By using certain formal constraints – a fixed stable of motifs including recurring landmarks, the passage from inside to outside, the musical principle of variation – the filmmaker establishes the place, or, more precisely, the milieu, in the physical sense, of a possible event, despite its being a secret, held at the border, restrained, just on the verge of visibility. This precise and meticulous ritual of framing ends up silently provoking a feeling of delectable suspense in us, thanks to the repetition of visual motifs. Again we are privy to the view from the window, the landscape breathed into the light, the persistent hum of the outdoors, the look of the filmmaker, surprised in the half-light, colored dust in the air, the filmmaker’s arrival on the scene, inhabiting the frame just for the duration of that shot, like so many occurrences, both predictable and unexpected.

    This rich tension between the self-reflexive elements of Rousseau’s films, wherein we experience the intimate and delicate nuts and bolts of filmmaking, and the refined result, to which we are also privy, struck me immediately upon viewing Rousseau’s two features, Les Antiquités de Rome and La Vallée Close. The filmmaker exposes his process by showing us the making of the selfsame film we are watching. By placing unedited Super-8 reels end to end separated by white leader, Rousseau challenges the very medium of film, the future of composition, and the distance between the initial shot and its unpredictable, almost hazardous, relationship with the shots that succeed it in the raw footage. One recalls the reference made to Lucrèce’s physique in La vallée close and Rousseau’s idea that editing is like placing various atoms around an orbit to form a constellation.

    The deceptively simple filming technique, too, provides us with many opportunities for surprise, an emotion requiring a transfer of energy: a lightning bolt. Rousseau’s films feed this courant by using different methods of exposure: exposure of light, hazy through the curtains of a room, changing at the whim of the hours, burning the white surfaces, scarring the black interiors with a golden rectangle, veiling the film from time to time like a stained-glass window. Exposure of places, each mapped out by the filmmaker, lighted differently according to their orientation. Exposure of the main musical theme, variations of which the film declines. Exposure of the film strip, revealing the filler and the uninterrupted takes. Exposure, also, of the filmmaker as he enters the scene, sits, glances occasionally at the camera, explores the frame for the length of this shot that he himself, conceived, and disappears. It must be said that one can also undergo “exposure” to pillory and torture. The filmmaker’s process is long and agonizingly lonely; the periods of waiting exacerbate the bitterness of his hypothesis as well as the sensuality of his moments of bedazzlement.

    But mightn’t these opposing forces work to bridge the gap between “mise-en-scene” as the Politique des Auteurs has defined it, and the raw elements of craftsmanship with which all artists are familiar? Jean Claude Rousseau’s films are situated at the crossroads of two asymptotes. The waiting light, the patient frame, the internal equilibrium of the objects as they all relate to one another, the restraint of the action; all are proof of the filmmakers stance vis-à-vis his craft. He elevates mise-en-scene to the position of vehicle for expounding upon his moral position. But, the way in which we witness the film being made and coming undone before our eyes, a seeming impossibility, made possible by the closely-related reels, the impersonal flatness of the visual presence of recording devices, and especially in the mysterious appearances and disappearances of the filmmaker, suggests the complete obliteration of the auteur.

    These contradictory impulses elicit paradoxical expectations from the audience. But who is our audience? It seems that Rousseau is seeking more of an accomplice than a spectator; someone just beyond the horizon, to which the spectator looks for an uncertain future. An invisible presence, at the edge of the frame, often gives himself away. He will be discreetly present in the films to come, emerging from the darkness of the forum of Trajan, from the twisted mouth of the telephone, or maybe from the dark grotto in La vallée close. Needless to say, it is this very relationship between the absent filmmaker, the improbable third party and the viewer that best describes the territory explored in Jean Claude Rousseau’s films.

    These three films, Jeune femme à sa fenêtre lisant une lettre, Venise n’existe pas, and Keep in Touch, made between 1983 and 1987, reveal a sort of archeology of Rousseau’s works, providing us with the opportunity to retrace a genealogy. It is interesting to note that each film incorporates the filmmaker turning on the camera, turning it around, and sitting in front of the lens, as if to prepare for a self-timed photograph. Also, these three films, in particular the first, Jeune femme à sa fenêtre lisant une lettre, function as anti-chambers for the films to come.

    Jeune femme, which redistributes and completes many of the motifs of the eponymous Vermeer painting, (a map on the wall with visible folds, a window, a letter, a model), becomes a “chamber film,” like chamber music, consisting of four movements in a series of formal variations. This complex and reflexive composition, where the structural elements of the film make up the raw material for the film itself, falls into the category of experimental films such as Michael Snow’s Wavelength or certain films by Kurt Kren.

    The motif of the letter, which already has an enigmatic place in the oeuvre of Vermeer, is the central symbol in this ensemble of variations. “This letter would be in the film. We would see it on the table next to the young woman staring out the window. She will have stayed on after my departure and the wind coming in through the open window will not have rustled it,” repeats the voice off in the film. In Vermeer’s painting, the self-referential letter, placed on a step ladder, follows the principle of mise en abyme all too familiar to the filmmaker (just read his fine script, Le concert champêtre, to get a feel for his fondness for this device). The film exhibits its composition; it constructs itself before our eyes. Thus, the four reels placed end to end make up the four movements of the film, providing us with a literal interpretation of the whole structure. A number of signature Rousseau touches can already be found in this first film: the close relatedness of the rushes – a combination of pure happenstance and premeditated programming – the obsessive fascination with the window, close attention paid to variations on light and its possible exhaustion, the draw of emptiness, (evoked here by the reoccurrence of white: the map of a place called LE BLANC at the film’s opening, the plain stationary, the windows covered with blank sheets of paper, the white leader separating the reels), the comings and goings of the filmmaker, the self-portrait in the mirror, the letter’s theme, the invisible presence of a third party, and the recitation that unfurls off screen.

    But the film is surprising less for its formal, modernist traits (serialization, mise en abyme, exposure of process, variations on a theme), which are its base elements, than for the novel vanishing point offered here as a form of closure for the whole system. In the film’s closing shots, having evenly distributed the painting’s scattered motifs, the filmmaker, letter in hand, enters the frame, approaches the window, and takes the place of Vermeer’s young woman. With all its successive approximations, its variations, and its mises en abyme, the film was merely searching for the justness of a single frame. Many takes are required to approach the precision of the painting, but the shot will eventually come. As he takes the model’s place, the filmmaker opens a black box, pierced by a pinhole, containing the raw elements of the film. At his place by the window, the heartbeat between looking and seeing iterates the theme of Rousseau’s films. The presentation of the painting’s motifs on screen reflected by the plasticity of their variations, leads to a vanishing point: the filmmaker’s regard at the crossroads, the first time the meeting of the materials and the finished product is articulated. Will the window be jammed? Is it an abutment? Is there a downpour outside? Jeune femme à sa fenêtre ends just before

    The second film, Venise n’existe pas, examines Venezzia in quite a paradoxical manner. A similarly raw allure draws us in, the clean cut ambient sounds, the super 8 reels placed end to end, the window and the variations on light patterns, the comings and goings of the filmmaker, from the bed to the window, the invisible presence of a third party heard through a telephone line, cutting off after the flat delivery of a “No, no, no.” Nevertheless, the film has two new concepts to present: that of the panorama (they say it was on the Grand Canal that Louis Lumière’s cameraman, Eugène Promio, invented the traveling shot by bringing the camera with him on a gondola), and that of cliché (Venice is the city for public gathering places, as the traditional vedute pictures show us). These two topics are definitely present, yet remain elusive. The spell usually cast by the panorama is lifted by the stability of the camera and the window frame as it distorts the slow and steady passage of the boats, to the tune of a recurring theme. Venise is not that easy to capture. The spectator’s gaze must form what it sees; but, in fact, cliché steps in to save the day by providing a pre-fabricated mental picture. By concluding with a long, blurry shot of a postcard, wherein the letter motif is married with the sound of a ringing telephone, goes back to the theme of the letter receiver. Venise n’existe pas exposes the difficult crystallization of an image. From bed to window, from room to open sea, the filmmaker attempts to capture an image concealed from view, delayed, sent from one place to another. Is the handwritten title, Venise n’existe pas, appearing at the end meant to be the message scribbled on the postcard we just saw? And the film itself a secluded postcard?

    Keep in Touch explores waiting periods. The filmmaker sits at a table in a room in New York, blank stationary paper in front of him. He turns on a lamp, leafs through an erotic magazine. Meanwhile, we hear various messages left on an answering machine: whispers punctuated by “love, love, love”; switching French to English, the voice tells of a move back into an old apartment. Another, in English, surprised by the answering machine, half-heartedly solicits a second date. The film explores this pause; the time between the initial encounter and the waiting period. The persistent hum of the city is perceptible, pierced by an ambulance siren. From still window frame to motionless view of snowy street, from the Brownian movements of skaters to the slow passage of clouds above the jetty, a formal layout seems to inform the flux of the elements, predicting the geometric compositions of Les Antiquités de Rome. Keep in Touch describes a steep, circular, solitary path. The lonely distance in the wait for a contact left in suspense, unresolved, this film resembles a refuge for pause and prayer. By its end, the filmmaker is again before his blank paper, letter still unwritten. The three words that appear on screen this time, Keep in Touch, seem to signal the beginning of the credits, but also act as a signature on the blank page. Thus, the films of Rousseau are literally envoys or filmed letters.

    These last two films mentioned, Venise n’existe pas and Keep in Touch, provide us with examples of the fragile equilibrium between the coarseness of the artist’s raw materials – the film’s grain, the light burning the film, the white leader, right up to and including the desperate and surly tone of the off-screen recitation – and the whole score, the invisible framework supporting these elements, the imagined frontiers. Between fragility and rigor, instability and equilibrium, the films of Jean Claude Rousseau are forthcoming; they leave gaping holes through which reality can seep in from just beneath the surface. The image is not up for discussion. It is there in the defenestrated window. The filmmaker steps across the boundary.

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