Projet
The American Tetralogy
Textes de Matthieu Orléan.
HOLD IN MIND
Elle : I wouldn’t have brought you here but your nose was bleeding and your feelings were hurt. (pause) I’m frightened to get up. I don’t want you to see me. The place repulses you, doesn’t it?
Lui : Après l’accident, pour la soulager de ses douleurs, elle sort quelques joints qu’elle possède. L’ambiance se détend. Et puis soudain, dans les vapeurs de drogue, apparaît comme sorti de nulle part, un homme avec une tête de girafe. Ils le regardent médusés. L’homme girafe dit qu’il est un être de fantasmagorie, une émanation du cinéma : « Vous m’avez déjà vu dans Shining ou Inland Empire. Avec un autre masque, mais c’était moi. L’homme inquiétant du cinéma moderne. »
Elle : He could remember velvet summer nights, the house quiet, the family watching something on the balky old TV; and he would sit in the hall dressed in a pyjama singlet and nothing else. In that light, he always looks like some soft and flapping oversized ghost.
Lui : J’ai toujours aimé William Holden, spécialement dans Sunset Boulevard. Aujourd’hui si on devait refaire le film, il faudrait qu’il soit nu dans la piscine.
HIS HOLD
Lui, chuchotant : The Girl with Black Stockings. The Beautiful Legs of Sabrina. Untamed Youth. Sex Kittens Go to College. Born Reckless. Guns, Girls and Gangsters. Star in the Dust. Voyage to the Planet of the Prehistoric Women. The Private Lives of Adam and Eve. You’ve Got to be Smart. The Blonde from Buenos Aires. The Second Greatest Sex. Yankee Pasha. The Sheriff was a Lady.
Lui : Mamie est la reine des B-Movies. Ses titres de films sont extraordinaires. Dit comme ça, ça ressemble plus à un poème qu’à une bande-annonce. (pause) Mamie ne croit pas au fantôme. Elle lui dira plus tard avec émotion : « J’ai oublié de répondre à votre question sur la plage. »
Lui : Elle est émouvante. Elle est grave, puis elle le fait rire. Je crois qu’ils ont juste un peu trop bu. Whisky. Champagne. Cuba libre.
Elle : Mais notre héros n’est pas encore trop décalqué. Il a des ressources. Je suis sûre qu’il va continuer son enquête et trouver ce qu’il cherche. Il réfléchit avec elle. Ses voyages incessants sont sa richesse personnelle.
Lui : I told you how I felt. I don’t know why you keep contradicting me. I know movies. I know movies better than I know art. Because I’ve lived with movies.
HOLD ON
Lui : À nouveau Downtown pourri. Chinatown et ses anomalies thermiques. La menace qui gronde. Le héros ne voit pas ce qu’il se passe, mais le spectateur oui. Il comprend avec un train d’avance. C’est le cœur de l’énigme qui se révèle. La vérité est dans les poubelles de la ville, ces arrière-cours où l’on ne va jamais. Ces endroits filmés par John Carpenter dans Invasion Los Angeles. John Carpenter est un documentariste, même dans ses films d’anticipation et ça personne ne le sait.
Elle : C’est Roxane Mesquida et Gaspard Ulliel. Los Angeles pour eux c’est un mélange de modernité et d’archaïsme. Ils ne savent pas trancher. Ils sont dans un Astro Burger, sur Santa Monica Boulevard. (pause) Je sais qu’elle a résidé un temps dans l’ancienne demeure de Charlie Chaplin à West Hollywood. Une superposition inattendue. Comme sont inattendus ces physionomies françaises dans ce décor californien.
Lui : C’était inattendu de la voir jouer chez Greg Araki et lui chez Gus Van Sant. Elle, la sorcière lesbienne, lui le joli pédé au marcel avec un verre de vin blanc. Ça les a rendus surnaturels, tu ne trouves pas ?
HOLD BACK
Lui : À Death Valley, il n’y a pas que Zabriskie Point. Il y aussi le Amargosa Opera House, et sa tenancière âgée, danseuse de Broadway, gaulée comme un trans : la danseuse Marta Beckett. Moi aussi quand j’ai vu ce vieux théâtre au milieu du désert et son musée fait d’automates qu’il faut remonter à chaque visite, je me suis dit : « Peering through the tiny hole, I had the distinct feeling that I was looking at the other half of myself. The building seemed to be saying « Take me… Do something with me… I offer you life. »
Elle : Danser sur le sable. Marcher sur le sable.
Elle : J’aime beaucoup son maquillage et son double-jeu.
Lui : Lacs de sel et maisons brûlées. Bruissement des fils électriques qui rend le paysage sous tension. À cinq heures de l’après-midi, le soleil s’en va, au sommet de la montagne. Une drôle de lumière tombe. Le silence est absolu. Le type est dingue, il dit : « J’ai déjà tué mon père de douze coups de couteau. » La pièce est humide. La vérité intrinsèque du crime lui saute à la gueule.